Perdu dans le noir [PV: Snowy]

Yuki s'était faite maudite. Elle avait été transpercée de part en part par les Chaînes du Jugement. Les dieux l'avaient condamnée à devenir une créature entièrement sous leur volonté. Ils avaient eu la bonté de faire d'elle leur instrument tout en la laissant ses sentiments et sa volonté, à présent qu'elle en avait abusé, elle ne serait plus qu'un pantin à moins de leur rendre hommage, ce qu'elle ne ferait jamais.

Au contraire, à présent, elle était d'autant plus décidée à combattre en attendant la fin. Car au fond, si elle voulait avant tout mourir, le fait de ne plus ressentir, de ne plus avoir conscience de ses chaînes, était une mort en soi qui lui conviendrait malgré les souffrances qui l'attendaient.

A présent, deux choses l'importaient: les enfants et les ténèbres. Quant à Stain, il ne risquait plus de représenter un danger enfermé au plus profond d'elle. Elle souhaitait comme toujours que personne ne la regrette. Mais elle s'était rendue compte à Agrabah qu'elle n'était pas du tout crédible en déesse du Mal et que les gens n'arrivaient donc pas à avoir peur d'elle ou à la détester.

C'était là les quêtes qui faisaient le restant de sa vie. Se faire oublier, protéger les personnes les plus importantes: les enfants (une aspiration qu'elle avait bien vu comme contradictoire avec la première), retrouver Mélodie pour s'assurer qu'elle allait bien, et s'aider des ténèbres pour arriver à ses fins. Chose que Stain, en elle, faisait bouillonner.

Yuki était venu ici, dans ce but, pour l'aider à faire appel aux ténèbres. Et puis parce que personne ne viendrait la trouver ici. Enfin, à Agrabah, elle était tombé sur un enfant étrange qui était disparu dans les ténèbres. Si elle pouvait le retrouver, elle trouverait la clé à certains de ses soucis. Au fond d'elle-même, elle ne savait plus trop quoi penser. Finalement, voulait-elle la mort ou au moins ne plus rien ressentir, disparaître, parce qu'elle n'en pouvait plus ? Ou bien aider les enfants, combattre le destin, et le destin des autres, combattre les dieux ? En d'autres termes, n'avait-elle pas encore un combat à mener ? Ou était-elle trop faible pour le mener ?

Yuki était taraudée par ces questions. Elle ne le montrait pas. Comme à son habitude, son visage était des plus stoïques. Soudain, elle sentit la présence de quelqu'un. Avait-elle enfin retrouvé le garçon qu'elle cherchait ?

Plaines mornes, ciel triste, voilà donc à quoi ressemblait les ténèbres.
Snowy resserra les pans de son manteau autour de lui : que de désolation dans ce monde...
Le jeune homme secoua la tête : ce n'était pas le moment de flancher ; il n'avait pas fait tout ce chemin pour retomber dans ses vieux travers. Il sortit une carte de sa poche, et l'observa ; il n'était plus très loin. Il pulsait sur la carte comme un cœur fatigué, mais vivant. L'Héritage de la Démone...

L'Héritage qu'avait laissé derrière elle sa mère, qu'il ne connaissait pas ; mais tout allait bientôt changer.
Le jeune homme se remit en marche, son manteau flottant autour de lui. Bientôt, il aurait les réponses à toutes les questions qu'il se posait. Bientôt, il mettrait fin à toutes ses souffrances. Bientôt, il atteindrait ce but qu'il s'était fixé il y a si longtemps.
Plus que quelques mètres...

Snowy s'arrêta. À l'emplacement qu'indiquait la carte se trouvait une jeune femme vêtue d'une tunique blanche.
"Hein ? C'est ça, l'Héritage ? C'est drôle, je m'attendait à quelque chose de moins humain..." Songea Snowy, surpris. Il regarda de nouveau la carte, puis la jeune femme, intrigué, mais... pourquoi pas ?
- Excusez-moi... Commença Snowy. Excusez-moi, bonjour, êtes-vous... Êtes-vous ce qu'on appelle "l'Héritage de la Démone" ?
Cette question semblait un brin tirée par les cheveux, mais elle était logique : dans un cas, l'autre répondrait que oui, elle l'était (ou alors elle répondrait par une énigme du genre "Il se pourrait bien que je le sois", façon vieux sage, ou encore "Que je le sois il se pourrait bien"), ou alors elle le regarderait avec des yeux comme des soucoupes, avant de s'enfuir en courant.
Remarque, elle n'avait pas l'air du genre de fille à s'enfuir en courant. Plutôt le genre à faire face...

Yuki sentit donc une présence derrière elle. Elle se retourna. Ce n'était pas la personne qu'elle cherchait, à son grand désarroi. Combien y avait-il de chance de trouver quelqu'un ici ? Surtout quelqu'un comme ce jeune homme ? Yuki resta droite comme un I quand il lui posa sa question étrange. Comme à son habitude, elle resta d'abord très silencieuse, pendant un petit temps avant de répondre de sa voix monocorde, lente, presque ennuyeuse, une réponse, elle aussi comme à l'habitude, laconique.

-Possible.

Yuki pencha légèrement la tête sur le côté, ce qui lui donnait un air de pantin dont la tête ne tenait plus debout. Elle resta silencieuse encore un temps, en se demandant ce qu'était "l'héritage de la démone". En tout cas, si c'était elle, on s'était bien gardé de lui dire. En tout cas, elle put se le confirmer: elle avait déjà vu ce garçon quelque part. Elle se dit également qu'elle allait encore devoir se montrer inamicale afin que ce jeune homme l'a laisse bien tranquille et qu'il ne s'attache pas à elle. S'il fallait se montrer violente... En même temps, elle l'avait toujours trouvée bizarre, du genre à se frotter à des choses pas bien nettes, démoniaques. Une impression qui venait de se confirmer encore plus.

-Tant que ce n'est pas une autre poupée... N'est-ce pas, Snowy ?

Yuki tira son épée, en faisant bien attention de la faire grincer et tinter sur son fourreau. Ce n'était pas un geste agressif, juste pour intimider un peu. Elle restait simplement l'épée sur le côté, dans sa main et son visage ne laissait bien sûr pas voir ce qu'elle pensait ou ressentait.

-Est-ce cela un démon ? Suis-je un monstre à tes yeux ? Dit-elle en étirant ses ailes noires, toujours pour l'effrayer encore plus. Elle ne lui voulait aucun mal, mais, insociable ou en tout cas, ne voulant plus avoir à faire avec les gens et surtout pas se faire apprécier (pour éviter qu'on la regrette), elle se voulait intimidante. C'était toujours plus crédible qu'avec Lexiem en tout cas

"Possible", avait répondu la jeune femme.
Snowy s'interrogea : "possible", ça voulait dire "non, mais j'ai envie de t'embêter un peu parce que t'as une tête de gros naïf" ou "oui, mais comme je suis un vieux sage il faut que tu sois capable de décider par toi-même" ?
Snowy, qui refusait de croire en la méchanceté naturelle de l'homme (parce que, malgré tout, il reste un gros naïf), opta pour la seconde option.

Jusqu'au moment ou la femme sortit son épée de son fourreau.
- Est-ce cela un démon ? Suis-je un monstre à tes yeux ? Demanda-t-elle, tandis que deux ailes noires s'étiraient dans son dos.
Snowy ne bougea pas. Il n'eut même pas l'air choqué, ou ébranlé. À la rigueur, ce qui l'avait le plus étonné, c'était cette histoire de poupée, mais bon...

- Vous ne ressemblez pas à un monstre, non, répondit Snowy d'une voix douce. Et je ne pense pas que vous en soyez un. Et si c'est le cas, alors nous le sommes tous... Non ? Son ton était empreint de franchise, ses yeux de candeur. Pourquoi devrait-il avoir peur, si c'était sa propre mère qui l'avait laissé là pour lui ?
- Je m'appelle Snowy, et je pense que question démon, je suis mal placé pour critiquer : si mes informations sont bonnes, ma mère en est... en était une... Est-ce vrai, euh... Comment dois-je vous appeler ?

Si cette femme était réellement l'Héritage, alors elle pouvait répondre à ses question.

Snowy, en revanche, n'avait pas envisagé une seconde que ça pouvait ne pas être le cas... Et que ce qu'il cherchait se trouvait peut-être juste en dessous...

Yuki fut étonnée d'une chose. Une chose insignifiante mais qui était dû au fait qu'elle croyait tout savoir sur les humains. Elle se faisait facilement surprendre quand les gens ne réagissaient pas comme elle l'avait prévu. Elle fut étonnée que Snowy ne se soit pas étonné du fait qu'elle connaissait déjà son nom. Elle s'étonna au final aussi qu'il ne soit pas effrayé, qu'il souriait, qu'il semblait légèrement naïf (pour ce dernier point, elle avait déjà pu quelque peu le découvrir mais on ne s'y fait jamais).

C'était vraiment une conspiration. Chaque fois qu'elle essayait de se montrer intimidante, on lui souriait, on lui riait au nez presque. C'était vraiment... Vexant. Cette irritation ne se traduit pas sur son visage qui restait de marbre, un vrai masque de cire, mais elle n'en pensait pas moins.

Ce qu'il dit la piqua un peu.

-Je vois. Pas étonnant que tu ne vois pas en moi un démon si tu es toi-même un enfant de démon.

Bien sûr, Snowy lui demanda comment il devait l'appeler. Une question qui revenait souvent mais qui agaçait Yuki. Donner son nom c'était déjà s'attacher à quelqu'un. En plus, les noms sont des armes parfaites. Avec un nom, on peut aisément nuire à une personne. Ce pourquoi, elle ne répondit pas. Elle garda le silence, rangea son épée, et croisa les bras. Finalement, après avoir laissé le silence s'installer encore une fois, elle se décida à reprendre la parole, histoire de mettre fin à ce face à face au plus vite.

-L'héritage de la démone... Je ne le suis pas. Je suis juste l'héritage de Shinrya... En quelque sorte.

Snowy sentit une sorte de malaise s'installer en lui. Quelque chose n'allait pas, il le savait : cette femme...
- Je vois. Pas étonnant que tu ne vois pas en moi un démon si tu es toi-même un enfant de démon, dit elle, monocorde.
- Ce n'est pas la seule raison, répondit Snowy, sans cesser de chercher à comprendre d'où lui venait cette sensation de gêne. Le silence s'installa, lourd.

- L'héritage de la démone... Finit elle par dire, ignorant visiblement la question concernant son nom. Je ne le suis pas.
Les épaules de Snowy s'affaissèrent.
- Oh, dit il seulement, d'un ton neutre, alors que ses yeux trahissaient une profonde détresse.
"Je la dérange pour rien. Je dois être en train de lui faire perdre son temps. À tous les coups, c'est ça, cette sensation... Je l'énerve." Le jeune homme baissa la tête.

- Je suis juste l'héritage de Shinrya... En quelque sorte.
Snowy releva la tête. Shinrya ?
- Vous connaissez Shinrya ? S'enquit Snowy, oubliant un court instant la raison pour laquelle il allait laisser la jeune femme tranquille. Vous avez survécu à la malédiction, alors ? Ou alors elle a été vaincue ? Snowy faisait ici allusion aux fantômes qui peuplaient les lieux la dernière fois qu'il était venu.
La fois où il avait abandonné Haruhi et Emiri pour suivre...

- Attendez... L'héritage... Ça voudrait dire que le monde est... mort, n'est-ce pas ? Murmura Snowy, après un très court silence. Savez-vous si il y a eu des survivants ?

Yuki sentit qu'au lieu de stopper la conversation, elle venait de l'alimenter comme on rallume un feu de camp en rajoutant une bûche. Elle avait senti que la déception de Snowy l'aurait finalement fait renoncer à la discussion et là, il reprenait le fil de la conversation. En plus, comme elle savait qu'il avait déjà été à Shinrya et qu'il ne la connaissait pas, elle aurait dû se douter que parler de Shinrya ne ferait que relancer la conversation. En plus, on ne pouvait pas dire que Shinrya était un sujet agréable pour Yuki.

-Survécue à la malédiction ? Peut-être. Mais pour plonger la tête la première dans une autre. Elle se maudit intérieurement, à vouloir toujours être vague et mystérieuse, elle donnait toutes les clés pour relancer sur une autre question. Peut-être aussi qu'elle savait que de toute façon, elle ne répondrait pas à cette question (en espérant que cela l'encouragerait à la laisser)

-Shinrya était déjà morte quand tu es venu. Elle est juste à présent, encore plus à la dérive. S'il y restait encore un peu de "vie", ce monde est à présent aussi silencieux qu'une tombe. Une tombe à la dérive. Et même ceux qui venaient de là-bas ne sont plus qu'un souvenir. Il ne reste plus que... Moi.

Elle pensait aussi à Stain, mais comme il était enfermé en elle, c'était tout comme s'il n'y avait plus qu'elle. Elle préféra ne pas préciser qu'Emiri n'était plus de ce monde, pas plus que Zarxnos. Toutefois, elle eut un sursaut, à peine perceptible, intérieur. Elle se rendit compte qu'elle mentait, sans le savoir. Il restait au moins une personne de plus. Et cette personne, elle se rendit compte d'une chose, c'est qu'à Port Royal, elle ne l'avait jamais retrouvé, et qu'elle était peut-être la seule personne qui, à ses yeux, hormis les enfants, devaient encore être protéger. Enfin, c'était surtout aux yeux des dieux, mais pour une fois, elle était plus ou moins d'accord avec eux parce qu'elle sentait quelque chose.

C'était décidé. Après le jeune garçon qu'elle cherchait ici, elle chercherait Haruhi. Mais, ce garçon ? Où pouvait-il bien être ?

- Il ne reste plus que... Moi.
La réponse frappa Snowy à la manière d'un coup de poing dans l'estomac. Le jeune homme recula, sous le choc, tandis que sa main se portait à sa poitrine.
Plus qu'elle ? Mais...
- Vous voulez dire, dit-il, d'une voix étouffée, presque inaudible, que... tous... sont morts... ?

Il s'interrompit. Et elle ? Originaire de Shinrya, elle était désormais sans monde, sans attaches, seule ; il était possible qu'en ce moment même, elle souffre, même si elle n'en laissait rien paraître. Absolument rien paraître.
Le silence revint. C'était dur d'aborder ce genre de sujet, encore plus avec quelqu'un qui, visiblement, n'aimait pas discuter.
"Ou ne "voudrait pas" discuter. Et ça, je pense que je peux aisément le comprendre..."

- Vous ne devriez pas rester ici, fit soudain Snowy. Cet endroit est dangereux, encore plus lorsque l'on se sent seul, ou perdu... Il hésita, puis ajouta, d'un ton plus bas : il faut rester droit, et continuer d'avancer. Tant que l'on a une raison de vivre...
La phrase resta en suspens. Mais il suffisait de lire dans ses yeux la détermination pour deviner la suite.

Yuki regarda Snowy. Il était presque aussi dégoûtant qu'Ondine à voir les choses de façon aussi optimiste. Enfin, ça n'était pas encore autant qu'elle. C'était une vérité, une vraie vérité, qui ne laissait pas encore trop présager de naïveté excessive. Ca sonnait plus comme une maxime pour échapper à son désespoir, une règle pour s'encourager à continuer à vivre, pas une phrase qu'il avait appris ailleurs et qu'il répétait bêtement. Il avait vécu quoi, avant de dire cela.

-Je ne me sens pas seule. Et être perdu peut-être une bénédiction. Tu as raison. Si tu as un combat, tu devrais rester droit. Mais moi... C'est différent.

Yuki regarda à l'horizon. Elle ne savait pas si elle pensait vraiment ce qu'elle disait ou si c'était pour mettre un terme à la conversation. Genre "oui t'as raison, t'es content ? Alors casse-toi." Elle guettait l'horizon quand elle reçut un caillou sur la tête. Le choc la fit tomber en avant comme une masse, sans prévenir. Elle tomba raide comme une statue qui venait de perdre son socle.

Tout en se massant le crâne, elle avisa le coupable. Un jeune garçon blond, au sourire malicieux, en costume élégant qui faisait sauter une autre caillasse dans son autre main.

-Ben alors, t'as mis le temps pour me chercher la poupée. Alors ? Tu fais quoi ? Ma pierre t'a t-elle coupée tes ficelles, pantin ? Ah ah ah ah !

Il disparut en courant, en riant. Mais Yuki avança la main. Elle la crispa et par sa force de télékinésie, elle renversa le garçon qui glissa, s'étala à terre, et se mit à glisser vers Yuki.

-Sale catin. Tu vas me le payer.

Yuki se releva et lui asséna un coup de pied dans le visage. Violemment, mais très raide, toujours comme un pantin sans émotion, comme actionnée par une ficelle.

- Attends ! S'écria Snowy, mais trop tard : la jeune femme shoota violemment dans le visage du garçon blond, avec une expression d'indifférence la plus totale.

Snowy resta un instant stupéfait ; il avait beau être habitué à voir des scènes de ce genre, il n'arrivait pas à s'y faire. Il savait que la plupart des gens avaient tendance à s'énerver, au point de devenir très violents lorsqu'ils se prenaient des projectiles dans la tête ; c'était compréhensible... Sauf pour Snowy, pour qui la vengeance était un concept complètement étranger. Il acceptait que les autres puissent agir différemment, mais restait juste incapable de les comprendre.

Puis il se ressaisit.
- Ce n'était pas la peine de le frapper comme ça, dit-il calmement, conscient d'être probablement hors-contexte puisqu'étranger à leurs affaires (mais n'empêche, on ne frappe pas les gens comme ça !). Des excuses auraient suffit, non ? Ou des explications ?
Snowy savait qu'il marchait sur un terrain miné, mais ça lui était égal. Ça faisait longtemps qu'il avait arrêté de se soucier de lui-même pour se consacrer entièrement aux autres.

Yuki regarda Snowy. En quoi cela n'était pas la peine de le frapper ? Des excuses ? Des explications ? Ce gamin ne lui en aurait pas laissé le temps. Elle le connaissait déjà trop. Perfide et sournois. Ce gamin lui filerait entre les doigts, lui jouerait un sale tour au moindre relâchement d'attention.

-Pourquoi faire ? Ne te laisse pas abuser par son apparence de gamin. Il ne mérite aucune pitié. Ou sinon, il en profitera pour te poignarder.

-Non. Non. Pas vrai. Par pitié, monsieur, aidez-moi. Se mit à pleurer l'enfant en pointant un regard suppliant sur Snowy.

Yuki lui redonna un coup dans le ventre pour qu'il arrête tout de suite ce cinéma. L'enfant se plia de douleur.

-Où est ton molosse ?

Yuki n'arrivait pas à décider qui du gamin ou des alentours elle devait garder à l'oeil. Si elle le perdait des yeux, il en profiterait pour s'enfuir, et Snowy n'avait pas l'air de vouloir lui faire du mal. Mais si elle ne surveillait pas ses arrières, elle se ferait indéniablement surprendre par la... "chose" qui suivait le gamin partout.

-Snowy. Garde ce gamin pour moi... S'il te plaît Le "s'il te plaît" eut du mal à passer. -Je dois couvrir nos arrières. Je reviens tout de suite. Tu pourras... Me demander quelque chose en échange.

Elle s'envola au dessus des terres des Ténèbres afin de repérer sa proie ou plutôt celui qui la prendrait bientôt comme une proie si elle ne faisait rien. En attendant, l'enfant s'avança en rampant vers Snowy.

-S'il te plaît. Aide-moi. Elle veut me tuer, me faire du mal. Je t'en supplie, si tu ne m'aides pas, je vais mourir. Dit-il en toussant bruyamment.

Snowy entreprit une nouvelle fois d'empêcher la jeune femme de frapper l'enfant, mais son geste s'avorta de lui-même.
"Ne te laisse pas abuser par son apparence de gamin. Il ne mérite aucune pitié. Ou sinon, il en profitera pour te poignarder", avait-elle dit.
C'était amusant, quelque part ; combien de fois s'était-il retrouvé dans ce genre de situation ? Combien de personnes lui avaient déjà dit "méfie-toi, il n'est pas ce qui semble être", ou "les gens mentent, c'est dans leur nature, alors ne fait pas confiance à n'importe qui" ?

Mais si on est tous comme ça, alors pourquoi certains mériterait de la pitié et pas d'autres ?

- Snowy, fit soudain la jeune femme. Garde ce gamin pour moi... S'il te plaît. Je dois couvrir nos arrières. Je reviens tout de suite. Tu pourras... Me demander quelque chose en échange.
- Soyez prudente, répondit automatiquement Snowy. Il regarda la jeune femme s'envoler, et une sorte de mélancolie l'envahit. Il avait beau avoir perdu pas mal de souvenirs, il lui restait les impressions.

- S'il te plaît, fit une voix à ses côtés, aide-moi. Le garçon blond était en train de ramper vers lui. Elle veut me tuer, me faire du mal. Je t'en supplie, si tu ne m'aides pas, je vais mourir.
Snowy le regarda, mais resta immobile. Il avait beau être quelqu'un de très altruiste et de sensible, il n'était pas complètement stupide.

Cependant, il ne put s'empêcher de s'approcher, et de s'agenouiller près du jeune homme.
- Mais non, vous n'allez pas mourir, dit il très doucement. Au pire, vous aurez quelques côtes fêlées, ça se soigne. Son ton n'avait absolument rien de moqueur, il était juste... franc. Il ajouta, avec un semblant de sourire : En même temps, je ne vais pas aller jusqu'à dire que je vais dans son sens, mais... Personne n'aime se faire traiter de pantin, et se prendre des pierres dans la tête. Peut-être devriez-vous reconsidérer votre technique d'approche ? Qu'est-ce qu'elle vous a fait, pour que vous la traitiez comme ça ?


[HRPG : Argh, ce perso' est de plus en plus dur à jouer, en plus de me taper sur le système !]

[HRP: désolé pour ces trois semaines de retard. Je ne sais pas ce qui s'est passé pour que j'oublie ce RP mais je reprends]

Yuki survolait les ténèbres en cherchant la chose qui servait de garde du corps au garçon. Elle finit par le repérer, ou plutôt le sentir dans une grotte non loin. Elle se posa devant l'entrée en rabattant ses ailes sur elle et en brandissant son épée.

-Allez. Sors de là.

Il y eut un sifflement strident en guise de réponse. L'instant d'après, sortait de l'ombre une araignée géante. Elle fit quelques pas du haut de ses huit pattes velues avant de faire battre ses mandibules. Yuki fonça sur les pattes de la bête mais à cet instant, elle disparut et Yuki s'étala de tout son long par terre. Elle se retourna. A la place de l'araignée se tenait un homme pâle, aux cheveux noirs, en queue de pie, en tenue de majordome en fait, avec des lunettes rectangulaires.

-Raté. Permettez. Mon maître m'a appelé.

L'homme s'envola mais Yuki en fit de même et le poursuivit. Elle l'attrapa en plein vol et le força à s'écraser avec elle sur le sol, entre Snowy et le garçon. L'homme attrapa Yuki au visage et l'envoya valser du côté de Snowy avant de se placer derrière le garçon.

-Monsieur ? Vous allez bien ?

-Claude... Tu es venu. Merci. Merci. Maintenant, tue cette shinigami avant qu'elle ne me tue.

-Yes your Highness !

-C'est ce que tu crois.

Claude se rua sur Yuki mais il fut soudain immobilisé par un sceau tracé par terre que Yuki avait préalablement placé, invisible, pour se protéger du démon. Yuki se releva en époussetant son habit avant de s'approcher du gamin.

-Maintenant que ça c'est fait. Tu vas m'accompagner.

-Où ça ?

-Tu verras. La ferme. Il me semble que je t'avais promis quelque chose en échange de ce service, Snowy.

[HRPG : "Oublié" ? Fichtre, et moi qui était persuadé de laisser un souvenir impérissable aux gens que je rencontrais... ^^]

Snowy avait eu _ inconsciemment _ un mouvement de recul au moment où la jeune femme et l'homme en tenue de majordome s'étaient écrasés au sol. Et _ inconsciemment également _ il avait dégainé ses armes, au moment ou l'homme s'était jeté sur elle.
Maintenant que le tension retombait, il se rendait compte d'à quel point ses reflexes avaient changé, que ce soit de niveau ou de nature.

- Maintenant que ça c'est fait, dit la shinigami, tu vas m'accompagner.
- Où ça ?
- Tu verras. La ferme. Il me semble que je t'avais promis quelque chose en échange de ce service, Snowy.

Snowy se tourna vers la jeune femme, tout en rangeant ses armes.
- Euh... Et bien en fait... Ce n'est pas la peine. Il eut un faible sourire. Non, vraiment pas la peine.
Il commença à marcher aux alentours, l'air pensif. Je peux me débrouiller, ne vous dérangez pas pour moi.
- Ou alors laissez moi vous aider, ajouta-t-il, avec cette fois une certaine malice dans les yeux

Yuki fut surprise par la demande de Snowy. Le service qu'il demandait: le laisser rendre service à Yuki. Rêvait-elle ou y avait-il contradiction ? Sur le coup, elle fut trop surprise pour savoir quoi répondre. Pour le coup, on put voir à sa bouche légèrement entrouverte qu'elle était étonnée. Une émotion passait enfin.

-M'aider ? Comment pourrais-tu m'aider ? Ou alors qu'il brise les chaînes qui la liaient aux dieux et qu'il la tue, la zigouille pour qu'enfin elle puisse profiter d'un repos éternel bien mérité. Et puis, selon elle... -Je n'ai pas besoin d'aide. En vérité, ce n'était peut-être pas complètement vrai. Elle avait peut-être besoin d'aide sans le savoir, besoin qu'on lui enseigne l'altruisme, de croire en l'avenir, de croire les gens et en leur force. Bref, à revivre et non à vivre dans le passé. Mais ça, elle était trop fière pour s'en rendre compte. Non... Pas fière. Elle se détestait. Mais en tout cas, trop têtue.

Yuki regarda le gamin qui se roulait par terre en geignant alors qu'elle ne l'avait pas frappé à nouveau. Elle croisa les bras en avisant ce garçon se tordant comme un ver de terre. C'était vraiment un garçon pitoyable. Comment ne pas le détester ? Il n'avait aucune fierté, aucun respect pour lui et les autres. Elle avisa Snowy, hésitant sans doute à lui donner un autre coup de pied. Mais en voyant Snowy, qui trouverait sans doute ça cruel de sa part, elle soupira et tendit sa main au garçon.

-Allez. Relève-toi.

Le garçon avisa la main de Yuki en affichant un regard étonné. Il prit la main de Yuki avant de lui mordre. Celle-ci gifla le garçon qui lâcha prise. Le pouce de Yuki pissait le sang.

-Faut une autre preuve que ce garçon est une vraie vermine ? Demanda t-elle non sans ironie.

- M'aider ? Comment pourrais-tu m'aider ? Je n'ai pas besoin d'aide.
"Vraiment ?"

- Ben... Je peux vous aider à les escorter, fit Snowy avec un mouvement de tête en direction des deux autres. Pour ne pas qu'ils s'enfuient.
"Et je peux aussi faire la cuisine, et me sacrifier pour les autres ! J'ai un "BAC altruisme +6" ! Profitez de notre offre exceptionnelle, pour un Snowy acheté, un démon offert..." Songea le jeune homme, en réprimant un sourire.

Yuki s'approcha du garçon blond qui continuait de se tordre de douleur sur le sol, et, contre toute attente, lui tendit la main. Snowy sourit vraiment cette fois.
"Bel effort... Je le savais."

Son sourire s'effaça quand la jeune femme se fit mordre par le jeune homme blond, et rétorqua par une mandale.
- Faut une autre preuve que ce garçon est une vraie vermine ?
- Vous lui aviez mis un coup de pied, répondit machinalement Snowy, toujours prêt à défendre l'indéfendable. Mais enfin, vous êtes sûre que vous n'avez pas besoin d'aide ? On ne sait jamais, avec ce genre de personne...

Il regarda la Shinigami droit dans les yeux, comme à la recherche de quelque chose. Puis il détourna la tête.
"En parlant de démon, il ne faut pas que j'oublie ce pour quoi je suis venu..." Sa main s'enfonça dans sa poche, et ses doigts enlacèrent la carte.

Les yeux dans le vague, il remarqua soudain qu'il fixait le sol.
Le sol...

- Il faut que je vérifie quelque chose... Murmura le jeune homme soudain. Il sortit sa carte, regarda sa position, le point scintillant, le sol.
- Je crois que votre sceau est en plein sur l'emplacement où je compter creuser... Finit-il par dire, avec d'un ton un brin désabusé, comme si ce genre de situation lui était maintenant classique.

Yuki regarda Snowy. L'aider à les escorter ? Elle n'y avait pas songé. Elle aurait du mal à surveiller les deux. Déjà un seul, étant donné la perfidie du garçon et sa faculté à se faire discret, même elle y laisserait quelques plumes. Même en restant éveillée, elle aurait du mal, (de toute façon, elle ne dormait plus)

Yuki regarda le démon de biais. Autant dire qu'il jubilait, pensant qu'elle allait devoir le libérer pour enlever le sceau de l'endroit que Snowy voulait atteindre. Elle claqua des doigts et le sceau s'enleva. Alors le démon sauta comme un démon sort de sa boîte. Yuki en fit autant. Elle savait qu'elle n'avait droit qu'à une seule chance. Tous deux, une fois à leur point de rencontre essaierait d'abattre l'autre et seul le premier coup compterait. Même si elle ne mourrait pas, elle faisait ça comme ça comme si c'était son dernier geste.

Les deux protagonistes lancèrent leur coup. Un coup d'épée pour Yuki, un coup de bras pour Claude semblable à une faux. Les deux coups se heurtèrent violemment. Les deux "armes" restèrent en contact, testant l'autre, cherchant à obliger l'autre à reculer. Mais... L'épée de Yuki, à force de pousser, finit par s'enfoncer dans la chair du bras du démon aussi dur que de l'acier.

-Quoi ?

Yuki profita de ce moment d'inattention pour trancher une bonne fois pour toutes le bras du démon et continuer la course de son épée dans son buste. Les deux chutèrent. Et quand Yuki retira son épée du buste, le démon disparut en poussière noire.

-Sale petite traînée ! A cause de toi, ma mort ne servira à rien ! Mon âme ne peut plus aller nulle part. Hurla le garçon.

-Ca, fallait y réfléchir avant de signer un pacte avec un démon

-Mais... Il n'était pas censé échouer.

-Non. En effet. Il a failli. Pitoyable. Acheva Yuki en rangeant son épée. -On va creuser c'est ça ? Pour ton service, on verra. Là, je n'ai plus qu'un gamin à surveiller. Termina t-elle à l'intention de Snowy.

- On va creuser c'est ça ? Pour ton service, on verra. Là, je n'ai plus qu'un gamin à surveiller.
Snowy ne répondit même pas, la gorge nouée.
- La déception est un sentiment dur à digérer, finit-il par dire, d'une voix dépourvue de toute émotion, qui semblait s'adresser à la fois au garçon blond, mais aussi à lui-même.
Et les âmes seules n'ont de toutes façons nulle part où aller, faillit-il ajouter.

Il s'agenouilla sur le sol, et commença à creuser à mains nues.
- Vous n'êtes pas obligée de creuser, dit Snowy, cette fois à Yuki, d'un ton plus chaleureux, tandis que les couleurs revenaient sur son visage. Franchement, sans outils, ce n'est pas très agréa...

Le jeune homme se tut. Quelque part, dans son cerveau, une ampoule venait de s'allumer. Les outils, ça se créé.
Une épée à la lame terne apparut entre ses mains ; Snowy se concentra un instant, et l'arme se recouvrit d'une épaisse couche de glace. Puis Snowy entreprit de creuser avec cette pelle improvisée.
Du Snowy tout craché, ça : donnez-lui une arbalète et il vous en fait une mangeoire à oiseaux.

Enfin, la lame cogna contre quelque chose de dur avec un "bonk" sonore.
Couché sur le sol, Snowy tenta d'extraire ce qui rappelait un vieux coffre blindé.

C'en était un ; Snowy réfléchis un instant devant la serrure : des boutons, des sortes d'écrous... Des barres qui coulissent, et un énorme bouton rond à faire tourner.
C'est évident, songea le jeune homme, qui fit jouer la serrure avec facilité, comme s'il s'était agi d'un de ces jeux dont le but est de placer le cube dans le trou carré, la balle dans le trou sphérique...

- Attention, murmura-t-il, en soulevant le couvercle. Et dedans, il y avait...
...
... Un livre. Non, pas un livre : un vieux bouquin miteux, à la couverture racornie, aux pages boulottées, crasseuses, et maculées d'une écriture illisible.

Mais surtout, un bouquin suintant, dégoulinant, débordant, un pur concentré de magie démoniaque.
- C'est un grimoire ! Fit Snwoy, triomphant, alors que la réaction normale de n'importe qui eut été de refermer le couvercle du coffre violemment en hurlant "Planquez-vous tous !".
Mais qui, de nos jours, était encore censé à ce point ?

Yuki resta fixe, comme si jamais elle ne pouvait sentir la lassitude ou l'envie de s'asseoir tandis que Snowy creusait. Quand enfin il trouva quelque chose, Yuki haussa les sourcils d'un coup, sentant que quelque chose clochait. Une odeur désagréable empestait. Encore plus fort que les ténèbres environnantes et pour pouvoir sentir plus fort que ça, fallait le faire, pour qu'une odeur se ressente plus forte encore.

Snowy extirpa d'un coffre, un grimoire qui puait la magie démoniaque. (ou démonique... ? Disons les deux) Cette situation donnait une sale impression de déjà-vu. Oui, comme à Agrabah avec Alazard. Encore un autre fou à la recherche d'une relique dangereuse sans se soucier des conséquences sur le monde et les autres ? Non, pas Snowy. Ce devait être de la bêtise plus que de la désinvolture comme Alazard. Celui-ci le faisait parce qu'il était obligé et qu'il se fichait des conséquences même si il les connaissait. Snowy n'était pas comme ça. En tout cas, ce n'était pas l'impression qu'il lui avait donné. Il lui avait donné l'impression d'un naïf heureux. Le genre à protéger ses amis, et même les inconnus, donc pas à se frotter à quelque chose d'aussi maléfique.

Mais peut-être ne sentait-il pas la malfaisance de cette chose ? C'était son devoir de le prévenir. Mais cependant, en tant que shinigami, elle n'avait pas le droit d'interférer. C'était ce qu'elle s'était dit à Agrabah, sinon, elle aurait attrapé Alazard et l'aurait forcé à lâcher la relique. Mais là... Mais qu'est ce qu'elle racontait ? Elle avait brisé ses chaînes, ou en tout cas, elle avait décidé de ne plus les laisser dicter sa conduite. Cependant, une autre idée lui était venue à ce moment où les chaînes ne s'étaient plus senties comme telle: elle avait décidé qu'elle ne laisserait plus personne essayer de l'aider, de l'apprécier, qu'elle serait la déesse du Mal pour que personne ne l'aime, et ne la regrette quand enfin elle serait morte. Elle devait disparaître sans faire la moindre onde sur l'eau de la vie parce que ce n'était plus son histoire, ce ne devait pas être son histoire.

Elle se sentait faible d'avoir pactisé avec les dieux. Elle se disait que ce n'était pas pour combattre Stain mais par peur de la mort et qu'elle était faible ou alors c'était par haine, et c'était aussi faible. Elle aurait dû accepter la fatalité, la mort parce qu'elle avait tout donné et laissé l'histoire s'écrire.

Ironiquement, voilà encore une vision qui n'était pas la sienne: accepter le destin. Elle le combattait depuis longtemps, refusant que l'histoire puisse être écrite à l'avance pour tous, de laisser les dieux décider pour eux. Mais où était son destin ? A quel moment allait-elle contre le destin ? N'était-ce pas le destin qu'elle ait choisi de pactiser avec les dieux, puis de briser ses chaînes ? Ou était-ce de mourir le jour où elle avait vaincu Stain, ou bien le jour où elle avait brisé ses chaînes ? Oui c'était très compliqué.

En attendant, il restait une question. Se faire haïr ou pas ? Disparaître sans conséquence ou pas ? Et donc que faire pour Snowy ? Ca y est ! Elle savait ce qu'elle devait faire pour se faire haïr, ne pas passer pour la sauveuse de Snowy et ne pas le laisser s'accrocher à elle et finalement le sauver quand même. Elle devait lui prendre le livre, de force. Elle ne le laisserait pas la considérer comme une amie. Il devait l'oublier ou la détester.

-Parfait, à présent donne-le moi immédiatement ! Dit-elle en pointant son épée vers Snowy.

-Je te l'avais dit ! Elle est dangereuse, nous veut du mal !

-La ferme ! Dit-elle sans crier en donnant un coup de pied au garçon, non sans le remercier intérieurement parce que sans le savoir, il allait dans son sens.

L'aura démoniaque emplissait lentement l'air, comme un gros escargot lymphatique sortant avec paresse de sa coquille.

Et Snowy, à genoux sur le sol, fixait le grimoire, tout pensif. Il ignorait tout de ce qui se tramait dans la tête de Yuki, son combat intérieur, ces réflexions sur la conditions humaine, ses pensées métaphysiques : il n'y avait que lui et le livre.

Cette aura lui était si familière ! C'était celle de Rain, c'était celle de sa mère ; et par dérivation, c'était aussi la sienne, mais en beaucoup plus puissante, et en "état d'éveil". L'aura d'un démon...

"C'est donc ça, l'Héritage de la Démone..."
Le jeune homme feuilleta délicatement l'ouvrage, craignant de le détruire. L'écriture était tout sauf lisible. Des pages manquaient, et celles qui restaient étaient dans un état lamentable.
Mais pour Snowy _ qui n'était pas du genre à critiquer les cadeaux, même empoisonnés _ cette découverte était la plus belle chose qu'il n'ait jamais faite.
C'était un cadeau de sa mère, bon sang ! Sa mère, qu'il n'avait ni vue, ni connue, lui avait laissé un cadeau, et pas n'importe quel cadeau : un livre dans lequel se trouvait toutes les réponses aux questions que Snowy se posait : était-elle vraiment une démone ? Et Rain aussi ? Était-il vrai qu'il n'était pas vraiment un "quelqu'un", mais juste un morceau de quelqu'un d'autre ? Avait-il vraiment pu réellement effacer tout un pan de sa vie comme ça, volontairement ? Et son autre moitié _ si autre moitié il y avait vraiment _ était-elle vraiment...

Le miroitement d'un éclat de métal interrompit soudain Snowy : Yuki venait de pointer son épée sur lui.
Et ce n'était sûrement pas pour lui présenter une brochette de marshmallows.
- Parfait, à présent donne-le moi immédiatement ! Ordonna-t-elle.
- Je te l'avais dit ! Elle est dangereuse, nous veut du mal ! Dit la garçon blond, avant de se reprendre un coup de pied. Snowy se surprit à se demander combien de coups de pieds il avait reçu depuis qu'il était là.
- La ferme ! Dit la Shinigami à son adresse, ramenant l'attention de Snowy sur elle.
Le jeune homme leva les yeux sur elle, avec une expression d'incompréhension la plus totale.
Et peut être aussi... de la pitié... Mais comment était-ce possible ? Non, ce n'était sûrement qu'une illusion, n'est-ce pas ?
- Mais... Que comptez-vous en faire ? Demanda-t-il avec un calme non-humain. Honnêtement, je ne suis pas sûr que vous y trouviez ce que vous cherchez, vous savez : il ne s'agit que d'un journal intime ayant appartenu à ma mère, et puis... Son ton changea de façon imperceptible : c'était juste un petit quelque chose dans la voix, quelque chose qui rendait son ton... Comment dire ? Je ne crois pas que me menacer avec votre épée soit très utile non plus. Je ne me battrais pas, vous savez ?

Adulte. C'était ça, le terme le plus approprié pour parler de son ton : adulte.
Snowy, avec son visage d'enfant, son sourire candide, ses yeux doux, parlait à Yuki comme un adulte qui tente de raisonner un enfant.
Un enfant sur le point de faire une bien méchante bêtise.

Yuki aurait dû s'en douter mais Snowy était désespérant à réagir toujours de manière aussi imprévisible. Elle ne savait pas bien quoi faire. D'abord parce que si c'était un journal intime et juste ça, c'était certes moins "diabolique". On pouvait même pas se justifier en disant "je veux ton grimoire maléfique qui va me rendre plus puissant". Elle ne savait toujours pas trop comment assumer son rôle de déesse du Mal, de "méchante".

-T'occupe. Donne-moi ça. Après un temps à ne rien faire, elle poursuivit. -Un journal ? Peut-être. Mais ça transpire les pires maléfices. Je suis sûre que je peux en tirer quelque chose. Et même si ce n'était pas le cas, ce que je désire, je l'obtiens toujours. Même s'il me faut verser le sang.

Pas très réussi. On aurait plutôt dit une gamine gâtée pourrie qui réclamait parce qu'elle obtenait toujours ce qu'elle voulait, plus encore qu'une déesse du Mal ou quoi que ce soit. Il fallait encore travailler. Elle s'en rendait compte elle-même mais elle n'arrivait tout simplement pas à faire du mal volontairement. Parce qu'involontairement qu'est ce qu'elle pouvait être cinglante, insultante et méchante, toujours à rabaisser en disant ce que les autres ne voulaient pas entendre, à presque les faire douter dans leurs nobles intentions. Mais là, elle était plus ridicule qu'effrayante.

Mais au final, elle commençait du coup à se demander si ce livre était si dangereux que ça. Cela semblait un simple journal et Snowy ne semblait pas avoir changer à son contact. Il restait désespérément ce garçon gentillet et pourtant si imprévisible. Mais elle pouvait quand même pas s'arrêter là. Ben si... Elle n'en avait de toute façon pas la force, c'était si vain.

-Et puis zut, laisse tomber. Si ce n'est qu'un journal, ça ne m'intéresse pas. Va te faire voir avec ton pitoyable morceau de papier moisi. Pour le coup, elle était déjà plus cinglante. Elle avait peut-être pas besoin de se forcer pour être un peu plus agressive. (sans pour autant le traduire par son visage, car celui-ci traduisait toujours cette même flegme)

-Bon viens là toi. On a à faire. Dit-elle en saisissant le garçon sous le bras.

-A faire ? Comment ça "à faire" ? Et puis, je veux pas aller avec toi.

-Tu crois que t'as le choix ? Combien de temps tu crois que tu tiendras seul ici ?

-Euh... Le silence qui suivit tandis qu'il observait les ténèbres était éloquent et Yuki tira encore une fois sur le bras du garçon.

-Ton nom au fait.

-Alois. Alois Trancy. Mais pour toi ce sera Comte Trancy.

-C'est ça... Gamin.

-Eh ! Ca sert à quoi que je t'ai donné mon nom si tu m'appelles avec des mots aussi rabaissant !

-A te faire te plaindre et ça marche ! Snowy. Tu veux me rendre un service ? Oublie-moi.Et tout ce qui s'est passé avec. Acheva t-elle autant par souhait de disparaître que par honte devant la pitoyable démonstration de "méchanceté" qu'elle avait donné.

- T'occupe. Donne-moi ça... ... ... Un journal ? Peut-être. Mais ça transpire les pires maléfices. Je suis sûre que je peux en tirer quelque chose. Et même si ce n'était pas le cas, ce que je désire, je l'obtiens toujours. Même s'il me faut verser le sang.
Snowy fixa intensément la Shinigami.
- Tout ce que tu désires ? Vraiment ? Mais désires-tu verser le sang ? Répondit-il d'une voix quasiment inaudible.

Yuki semblait maintenant réfléchir, puis déclara, acerbe :
- Et puis zut, laisse tomber. Si ce n'est qu'un journal, ça ne m'intéresse pas. Va te faire voir avec ton pitoyable morceau de papier moisi.
Cette fois, le masque d'impassibilité de Snowy s'effaça un instant tandis que le jeune homme fronçait les sourcils, perplexe.
Yuki, pendant ce temps, se tourna vers le garçon blond.
- Bon viens là toi. On a à faire.
- A faire ? Comment ça "à faire" ? Et puis, je veux pas aller avec toi.
- Tu crois que t'as le choix ? Combien de temps tu crois que tu tiendras seul ici ?

Snowy les regarda se quereller, distraitement.
Une hypothèse se construisait lentement dans sa tête, tandis que les indices s'accumulaient.
Oui, c'est sûr, ce journal ne dégageait pas une aura saine. En fait, elle était carrément mauvaise.
Et oui, puisque la Shinigami en parlait, Snowy se doutait bien que, dans un journal rédigé par un démon, il était fort probable de trouver des sorts et des formules pas bien nettes-nettes.

Il repassait en revue les différents échanges qu'il avait eu avec elle. Il n'allait pas se laisser aller à la psychologie de comptoir, mais tout de même...

- Snowy.
Snowy releva la tête à l'appel de son nom.
- Tu veux me rendre un service ? Oublie-moi. Et tout ce qui s'est passé avec, fit Yuki.

Ça, c'était la meilleure. C'est sûr que ce genre d'entrevue s'oubliait facilement...

Snowy joua alors sa carte maîtresse. C'était un mix de candeur enfantine et de réflexion sophistiquée, le tout basé sur la chance. Beaucoup de chance.
- Pourquoi jouez-vous à la méchante ? Ça ne vous va pas.

https://www.youtube.com/watch?v=8XOV2L-eM38

Yuki s'arrêta brusquement. Elle serra le poing faisant entendre les craquements de son gant en cuir. Alois regarda d'en bas le visage de Yuki, s'attendant à le voir se renfrogner. Après tout son corps traduisait soudainement ce renfrognement, mais non, son visage demeurait malgré tout impassible. Elle se retourna vers Snowy.

-Parce que je ne suis pas censée exister. Quel intérêt à se montrer gentille avec les gens puisque je ne suis plus censée faire partie de leur monde ? Au final, je disparaîtrais et toutes ces futilités ne seront restés que... Des futilités... Du vent. Comme mon existence.

Elle enleva son gant et présenta sa main levée devant elle. Elle souffla dessus et sa main disparut en de la poussière qui s'envola au fur et à mesure.

-J'ai tenu à exister encore un peu pour arrêter ceux que je n'avais pu arrêter avant ma mort. Aujourd'hui je le regrette. J'ai été faible, je n'ai pas accepté la mort. Je connais des tourments pire que la mort. Les dieux m'ont maudits et je ne serais bientôt plus qu'un spectre sans âme. Mais au moins, ma douleur passera. J'ai peu de temps pour faire ce qu'il pourrait me rester à faire. Pas le temps pour les gentillesses, les bonnes attentions. Je sais même à peine ce qu'il me reste à faire. Je m'ennuie.

Yuki se détourna une fois encore, sa main revint en place et elle remit son gant en le serrant fort. Et son regard trahissait une certaine mélancolie.

-Ah ! Ah ! Ah ! Trop drôle ! Et c'est ça qui essaye de me faire la loi. Tu es pathé...

Yuki lui asséna une gifle bien placée.

Musique : A Fight for Your Remembrances

- Ce n'est pas pathétique.
La voix de Snowy était posée, calme. Mais froide. Tout comme son être : sa peau, ses couleurs, l'air qu'il expirait.
Ce n'était pas juste. Derrière le masque impassible de son visage les sentiments se bousculaient. Notamment celui d'une profonde injustice.
Pas censée exister ? C'était trop drôle. Pas censée faire partie de leur monde ?
Mais pourquoi la vie était-elle aussi mal foutue, bordel ?

- Vous avez tenu à survivre malgré la mort... Je ne sais pas si l'on peu qualifier cela de faiblesse. Snowy avait l'impression que chacun de ces mots était bidon. Ils n'étaient que le reflet sans consistance de toute une existence - la sienne.

Une âme n'était pas censée être arrachée de son corps, cela n'aurait jamais dû être. Lui n'aurait jamais dû être.
Et même s'il avait rayé ces douloureux souvenirs de sa mémoire, il le savait, au fond, qu'il n'était qu'un résidu d'expérience ratée. Un truc qu'on aurait dû détruire tant qu'on le pouvait, un truc qu'on aurait dû anéantir, et cacher au plus profond des ténèbres de la mémoire, oublier. Pas d'existence possible. Pas de traces.

"Mais on est là, et c'est là tout le problème. Et on a vécu 13 années, alors que l'on n'existe même pas. Que ce n'est pas du vrai sang qui coule dans nos veines. Que l'on ne respire pas vraiment, que ce n'est qu'une illusion, parce que les fantômes ne respirent pas."

À Shinrya, il avait vu sa chair se déchirer sur une plaie qui ne saignait même pas.
Dans l'infini de l'espace, il avait compris que sa vie ne rimait à rien sans les autres. Parce que c'étaient les autres qui le faisaient vivre. Parce que l'on voyait en lui une forme de vie ; et que cette forme de vie n'existait que parce que les autres lui donnaient un sens.
Mais exister, était-ce seulement vivre ?

- Vous avez dit que vous vouliez vivre pour accomplir quelque chose. Vous avez survécu pour cela. Vous dites ne pas vous souvenir de l'objectif que vous vous êtes fixé. Derrière la voix calme perçait la passion. Mais je suis sûr qu'au fond de vous, vous le savez : les souvenirs ne sont jamais perdus, il suffit de vouloir... Vous avez suffisamment de volonté pour survivre, vous en aurez suffisamment pour savoir pourquoi vous avez survécu !
Vous dites vous ennuyer : je sais ce que c'est de se sentir à part, d'avoir l'impression que ce monde ne veut plus de nous. Mais... Une vision s'imposa dans l'esprit de Snowy. Celle d'un homme blond vêtu de noir. Mais cette fois il ne la chassa pas. On s'est fixé un objectif... Murmura-t-il, tandis que la vision flottait devant ces yeux, comme un drapeau. Et à la fin, on aura droit au repos...

Le repos. Ce mot sonnait comme la récompense ultime. Et il savait que quelque part, loin, dans les ténèbres, quelqu'un d'autre pensait comme lui. Quelqu'un qui ne survivait que grâce au sentiment de haine, de vengeance. Quelqu'un qui savait qu'à la fin, il y aurait la douceur du repos.

- Nous préférerions être morts, mais nous avons promis... Et nous nous battrons pour ça... Snowy redressa la tête. Ses yeux brillaient, fiévreux. Ne perdez pas de temps à être gentille, mais n'en perdez pas non plus à être méchante : soyez vous-même... C'est le plus simple. Vous souvenez vous des circonstances de votre mort ? Qui vouliez-vous arrêter ? Pourquoi ? Essayer de répondre à ces questions. Essayez de savoir pourquoi vous avez oubliez. Essayer de comprendre... Les souvenirs sont ce que l'on a de plus précieux... On ne doit pas les effacer... Ça n'a jamais aidé personne d'oublier... Il faut faire face : sinon, ce ne seront jamais que des combats repoussés au lendemain... Les gens qui disent que tout ira mieux une fois les choses oubliées se trompent. Ses traits étaient tirés. Il faut se battre pour ses souvenirs...

Yuki écouta Snowy, le dos tourné comme si elle ne voulait pas affronter son regard, soit par peur de laisser aller ses sentiments, soit par renfrognement. Il l'exhortait à continuer, à rester elle-même et à se battre. Elle avait la sensation de ne faire que ça. Au fond d'elle-même elle n'avait pas abandonné, mais simplement pour atteindre la fin, pas pour un but particulier autre que celui de mettre un terme à sa malédiction: sa vie. Alors il n'était pas nécessaire de l'exhorter à se battre. Une volonté de survivre ? Inutile. Survivre elle le faisait à cause des dieux qui ne pouvaient se résoudre à la relâcher.

-Je n'ai pas vraiment oublié ma tâche. Je l'ai... Remplie. Plus ou moins. Je me souviens de tout. J'ai combattu Stain, il avait trahi Shinrya, trahi la reine, et plongé le pays dans le chaos juste pour réveiller le volcan et l'horreur qui y dormait. J'ai réussi à stopper cela, seul Marina avait réussi à sortir à mon insu. Mais j'ai échoué à vaincre Stain et sauver le royaume, le peuple et la reine... Stain m'a tué. Et aujourd'hui, il est quasiment immortel. En moi. J'ai réussi à le battre récemment et aujourd'hui, pour m'assurer qu'il ne fera plus de mal, il est emprisonné en moi. Ironie du sort. L'homme que je déteste le plus, qui m'a tué, fait à présent partie de moi.

Yuki se retourna.

-Je n'ai rien oublié. Tout est ancré dans mes veines comme les chaînes des dieux.

Dans son regard, passa soudainement la lueur malveillante de Stain, elle n'était pas bien sûr que cette présence n’influençait pas parfois ses actions. Le contrôlait-elle ? Qui contrôlait qui ? La présence de Stain était pernicieuse, presque imperceptible, elle avait presque l'impression qu'il n'existait pas et c'est ce qui le rendait dangereux.

-Au moins une raison de ne pas mourir: si je meurs, il sortira plus vivant que jamais.

-Heu... Vous avez vu que je suis là ou carrément pas ?

-Ce gamin a fréquenté les démons. Il connaît des secrets interdits, possède quelque chose en lui qui pourrait me permettre d'éradiquer Stain ou de l'envoyer là où il ne sortira plus jamais.

-T'as fumé ?

Pour une fois, Snowy ne sut pas quoi dire. Déjà, il devait reconstituer l'immense puzzle qui lui tenait lieu de mémoire : Stain, Shinrya, Marina, la Reine... Il connaissait tous ces noms, mais il fallait les remettre en ordre. Et mettre des visages sur les noms.

Ensuite... Que pouvait-il dire ? Il se sentait un peu perdu, en vrai. Un peu désarçonné.

- Ben , c'est plutôt chouette, non ? Finit-il par dire. En fait, tout ce que vous avez à faire, c'est de connaître les secrets des démons, et ainsi d'érad... faire dispar... détru... envoyer Stain là où il ne sortira plus ja... Enfin tout ça, vous voyez ? (Snowy avait enfin fini par comprendre que certaines personnes préféraient voir leurs ennemis morts plutôt que de tenter de discuter avec eux. C'était triste, mais c'était comme ça.)

Bien sûr, c'était sans compter la participation d'Alois, qui, visiblement, n'était pas du même avis que tout le monde (pour changer). Et Snowy voyait gros comme une maison ce qui risquait d'arriver si le jeune homme blond refusait de parler à la Shinigami, vu son caractère.

- J'ai côtoyé quelques démons, je peux peut être t'aider (idée fixe) ? Il regarda son précieux livre (entre guillemets, pour ne pas dire "torchon"). Peut-être qu'il y a des infos utiles, dedans, peut-être qu'ils parlent aussi des collocations d'esprits dans un même corps...

C'est ce moment précis que choisit le bouquin pour tomber en miettes, répandant sur le sol ses pages toutes griffonnées à l'arrache. Snowy ouvrit des yeux grands à s'en faire sortir les globes oculaires des orbites.
- Wah ! Mon livre ! Le jeune homme se laissa tomber sur le sol et commença à tout ramasser. Oh nooon...

Snowy tentait d'attraper les pages sans les abîmer plus qu'elles ne l'étaient quand il se rendit compte soudain d'un truc. Un truc ennuyeux, un truc vraiment pas drôle. Mais inévitable pour tout scénario bidon qui se respecte.
- Il manque des pages... Murmura Snowy d'une voix blanche. Il manque le chapitre I... Et le II... Et le III... Et puis... Il se redressa, livide. Il manque plein de chapitres...

On pouvait légitimement s'attendre à ce qu'un petit machin chétif comme Snowy, avec sa tête de petit fantôme malade et sa voix de gamine, se mette à fondre en larmes. Au lieu de ça, le gamin soupira, et, lassé, alla à la table des matières trouver les noms des chapitres manquant.
- Chapter One : Beauty of the Beast
Chapter Two : Ocean Soul
Chapter Three : Majesty's Last Roar
Chapter Four : Biting Sand...
Je ne comprends rien... de quoi ça peut bien parler ? Ça n'a aucun rapport avec le reste... (dit-il sans pour autant avoir lu le reste)

Yuki regarda Snowy en se demandant d'où lui venait cette envie de vouloir l'aider. Et cette étrange optimisme. Comme si c'était si simple de trouver le pouvoir des démons et de l'utiliser sur Stain. En fait, elle avait presque inventé cette histoire de toutes pièces pour se justifier. Alors, certes, Alois avait ce secret. Certes, on pouvait y trouver une utilité mais alors est-ce que c'était la solution, est-ce qu'on pouvait seulement en tirer quelque chose ? Pff, Yuki ne faisait qu'inventer une histoire en attendant qu'elle n'ait plus de conscience propre, pour rendre sa vie plus supportable.

Soudain, le livre se détruisit de lui-même et la triste vérité se révéla: y manquait des chapitres. Il énuméra les noms des chapitres manquants. Yuki resta fixe. Et pourtant elle réfléchissait. D'autres se grattent le menton, les cheveux... Mais elle semblait ne rien en avoir à foutre, ou être absente. Mais non, elle réfléchissait vraiment, comme un ordinateur qui recherche des données sans montrer le moindre ressenti aux informations données.

-Impossible de savoir ce que cela signifie. On aurait presque impression de l'entendre dire d'une voix de robot: "ERROR SYSTEM" -Toutefois, c'est étrange, ces mots me font penser à des mondes. Chaque chapitre semble ramener à un monde. "Beauty of the Beast", ça pourrait être le château de la bête. "Ocean Soul" l'âme de l'océan ça pourrait être Atlantica. "Majesty's Last Roar", le dernier rugissement de son altesse, peut-être la terre des lions, mais j'en suis moins sûre. Et enfin, Biting Sand... Agrabah peut-être. Les autres chapitres, tu les as ? Voilà qu'elle s'intéressait aux problèmes de Snowy, une première ! Il fallait croire qu'elle aimait les énigmes et encore plus les résoudre et passer pour une "je sais tout". Qui sait ?

Snowy fut un peu surpris : il ne s'attendait pas à une réponse de ce type venant de la jeune femme. Toutefois, il s'exécuta :

- Chapter Five : Beautiful Insanity :
-- The Case of Lullaby (Snowy écarquilla les yeux)...
-- Schizophrenia : the Case of... (Il déglutit difficilement) Rain...
Chapter Six : Soul and Corpse :
-- Sharing,
-- Soul dissection,
-- Separation and Tearing,
-- Soul Desecration...
... Et c'est tout : le reste n'est pas dans la table des matières, termina le jeune homme en désignant les pages de la fin, une bonne cinquantaine de feuilles gribouillées sans titre ni ordre logique.

Snowy releva la tête, le regard dans le vide. Ainsi Rain était déjà schizophrène à l'époque...
- Peut-être que je devrais aller voir dans les mondes dont vous avez parlé, voir si je trouve quelque chose... "Le Château de la Bête", vous avez dit ? C'est par là que je devrais commencer... Snowy se leva, s'épousseta, et regarda la Shinigami. Que comptez-vous faire, maintenant ?

Yuki n'entendit pas pour le coup de noms de monde dans les autres chapitres. Pour le coup, cela semblait des chapitres banals. Oui enfin... Presque. Les noms évoquaient des choses assez terribles aux oreilles de Yuki. Comme une sorte de manuel de dissection, de magie noire... Pas étonnant. Pour le coup, ses noms étaient en parfaite adéquation avec la nature démoniaque du livre.

Snowy se tourna vers elle, annonçant son intention de partir pour le château de la bête. Il lui demanda également ce qu'elle comptait faire à présent. Yuki observa Alois du coin de l'oeil. Celui-ci sembla soudain craindre le pire, et il y eut une ombre de peur qui passa sur son visage.

-Je vais tâcher de trouver le moyen de découvrir le pouvoir que ce gamin connaît. Je vais l'emmener dans mon repaire. Ce sera plus facile de garder un oeil sur lui.

-Tu ne pourras jamais me retenir, je peux m'évader de tout.

-Même d'une grotte au sommet d'un pic rocheux de milliers de mètres ?

Alois déglutit tandis que Yuki s'approchait de sa démarche raide de lui. Lui, reculait à quatre pattes sur le dos. Yuki l'agrippa par la hanche et le coinça sur la sienne, les yeux ronds inexpressifs. Alois protesta en frappant des poings et des pieds, mais Yuki ne laissait transparaître aucune douleur.

-Sois prudent Snowy. Je doute que ce livre te mènera vers de bonnes choses. Tu vas t'engouffrer dans des secrets obscurs qui engloutiraient n'importe qui.

- Sois prudent Snowy. Je doute que ce livre te mènera vers de bonnes choses. Tu vas t'engouffrer dans des secrets obscurs qui engloutiraient n'importe qui.
Snowy acquiesça lentement.
- Oui, ça, je l'ai compris le jour où j'ai quitté ma maison...
... C'est juste que je n'ai pas voulu voir la vérité en face, à cette époque, songea-t-il, amer.

Il rangea le livre dans la poche intérieur de son manteau - pas question de l'abîmer d'avantage ! - et jeta un dernier regard à la Shinigami ; il ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter pour Alois, et ça le dérangeait de partir comme ça. De même, il ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter pour elle.
- Si je découvre des renseignements qui pourraient vous être utiles, je vous en ferais part, fit-il avec un sourire pâle. Et... Même si ça peut paraître niais, ce que je vais vous dire... Ne soyez pas trop dure avec lui. Je sais qu'il a fait du mal, vous aussi, et je sais que je ne suis qu'un étranger à vos affaires... Mais je sais aussi que la souffrance n'a jamais rien arrangé à quoi que ce soit. Entretenir un esprit de vengeance... N'est pas une bonne chose.
Snowy eut un petit rire. Ça ressemblait un peu à un sanglot aussi. Il voulait croire que ce qu'il disait était vrai. Il voulait croire que les autres le pensaient aussi. Il y croyait sincèrement.

- Et bien au revoir, et bonne chance ! Fit-il, en tournant les talons, et en s'éloignant, il fit un petit signe de main. Il s'enfonça dans les ténèbres, comme un spectre dans la nuit.