Par le feux, la poudre, l'épée et la magie (libre ?)

Senjougahara sursauta tellement qu’il manqua de tomber du mât.
- S’lut, grogna-t-il, mécontent de s’être fait surprendre de la sorte – et, accessoirement, fatigué par sa nuit blanche.

Il n’avait pas vraiment envie de parler de ce qu’il s’était passé la veille. Jusqu’à présent, il pensait que les défunts et les vivants ne pouvaient communiquer ; qu’une fois trépassé, on ne servait plus qu’à nourrir la terre sur laquelle on avait vécu.
Cette nuit avait remis en cause toutes les croyances de son peuple.

Toutefois, l’adolescent s’inquiéta réellement quant à l’état de Keradan, lequel semblait avoir passé une nuit aussi mauvaise – sinon pire – que la sienne. En outre, tout son ressenti envers le mercenaire s’était envolé avec la brume matinale.
Ce fut donc d’une voix timide et douce que Senjougahara demanda :
- Comment vas-tu ?
Après tout, ne s’adressait-il pas à son mentor, et à celui qui lui avait sauvé la vie la veille ?

Au bout de quelques heures, Skya arriva, fraîche comme la rosée matinale.
- Salut! On arrive cet après-midi? Ou bien quand? Lança la jeune femme avec enthousiasme.
- Ouais, on arrive en principe cet aprèm, ou en début de soirée, ça dépend, répondit Senjougahara avec un sourire. Puis le jeune homme se tourna vers Keradan. Je vais aider les gars sur le bâtiment !
Et, ayant prononcé ces mots, le gamin bondit agilement et souplement dans le phare, atterrit sur le ponton en une roulade, et courut proposer son aide à droite et à gauche.
Il avait tellement envie de rencontrer le sinistre Barbe Pourpre !

Keradan fit une grimace quand Senghou lui demanda comment il allait.


-J'ai connu mieux. Sacré balade qu'on a fait pas vrai ? Mais ne t'en fais pas, j'ai été un peut secoué mais à part ça, je vais bien. Keradan se tut et se contenta de regarder le paysage aux côtés de son élève. Il n'avait jamais été particulièrement attiré par la mer mais il en l'observant ainsi, au calme, il pouvait comprendre que certains lui dédit leurs vies.


Quand Skya arriva pour leur demander quand ils arrivaient il laissa Senghou répondre et aller aider les autres. Lui préférait rester où il était et observer la mer et les environs. Il n'avait pas envie de s'agiter aujourd'hui mais de réfléchir.

le temps passa, lentement jusqu'à l'après midi sans que rien ne vienne le troubler. Jusqu'à ce que Keradan aperçoive une forme qui flottait sur l'eau. Keradan finit par remarquer en se concentrant qu'il s'agissait d'un homme visiblement inconscient accroché à un débris de bois. 


-Homme à la mer ! Hurla-t-il à l'attention de l'équipage en pointant l'homme. Aussitôt l'équipage s'activa pour récupérer l'individu. Keradan descendit pour aller aider, difficilement on parvint à attraper l'homme avec des crochets pour le hisser sur la navire... Quand ils virent à quoi il ressemblait plusieurs marins reculèrent, intimidés voir même efrayés. Un ou deux allèrement même jusqu'à se signer. Seul Keradan osa s'approcher, et pour cause, il connaissait cet homme.


D'environs un mètre soixante-dix, il avait la de la même pâleur que Keradan et les mêmes cheveux noirs corbeaux il avait une forte carrure, large et musclé et ses bras incroyablement musclés semblaient avoir la force de déraciner des arbres. Mais ce qui frappait le plus c'était l'énorme corne qui lui sortait du front qui renforçait son aspect intimidant et malgré son inconscience il tenait fermement une hache ébréchée mais à l'air redoutable dans sa main. Keradan vérifia son pouls et poussa un soupir de soulagement. Son frère Araktor était vivant.

- Homme à la mer !
Cette phrase eut sur l’équipage l’effet d’une pièce de viande jetée aux piranhas : la réaction fut instantanée, rapide, et rudement efficace. En quelques secondes à peine, les marins hissèrent l’homme à bord.
Senjougahara se précipita avec le reste de l’équipage… et partagea leur mouvement de recul. Outre son imposante hache et ses bras musculeux, l’homme recueilli des flots portait, sur son front, une impressionnante corne.
Et le jeune homme fut impressionné.

Il fut d’autant plus impressionné de voir Keradan s’approcher, et prendre le pouls du colosse.
- Il est vivant ? Murmura Senjou en s’approchant timidement.
Les marins, quant à eux, observèrent le mercenaire avec une méfiance teintée de dégoût.  
- Dis... tu sais qui sait? Il te ressemble étrangement fort ! Fit alors Skya. Et, ayant prononcé ces mots, la jeune femme entreprit de s’emparer de l’arme du titan inconscient.
- Euh, Skya, je suis pas sûr que… commença l’adolescent aux cheveux miel, légèrement inquiet.
Ce type devait pouvoir arracher la tête des curieux importuns d’une gifle ! … Et surtout, il ne devait pas être du genre à apprécier les voleurs !

Keradan n'était pas inquiet, il savait son frère solide et qu'il allait vite récupérer. A son avis, son rétablissement n'était plus qu'une question de minutes, voir d'heures. En voyant Skya essayer de lui retirer sa hache il fronça les sourcils, ce n'était pas une bonne idée. Son frère était particulièrement possessif avec son équipement et comme l'avait bien supposé Senghoujara, n'appréciait pas les voleurs.

-Skya ce n'est pas...

-Lâche ça tout de suite si tu ne veux pas savoir ce que ça fait de ramasser ses dents avec les doigts cassés.


La voix qui avait interrompue Keredan était rocailleuse et autoritaire, sèche et claquante comme un fouet. On ne doutait pas en l'écoutant que son possesseur était parfaitement capable de mettre sa menace à exécution.


La tête d'Araktor qui avait été accidentellement penchée vers Skya avait vu ses yeux s'ouvrir. Des yeux qui n'avaient rien d'amicaux et en les croisant on était en droit de se demander si leur propriétaire n'était pas capable d'aller plus loin que ses menaces initiales.


-Toujours aussi amicale à ce que je vois. Dit Keradan avec un petit sourire.

Araktor grommela en se retournant et quand il vit son petit frère il eut aussi un petit souri.

-Tu me connais petit frère, j'ai jamais aimé les voleurs.


Keradan lui tendit une main pour l'aider à se relever mais Araktor la refusa pour se redresser seul. Il observa son environnement et son regard tomba sur Skya et Senghoujara. Avec un sourire ironique il revint à son frère.

-Tu t'occupes des crèches maintenant ? T'a copine te ramollit.

-Pour eux, c'est un peut compliqué. Et laisse Kavitichie en dehors de nos histoires tu veux ? Qu'est-ce que tu fais là ?


-La même chose que toi je suppose, je chassai un gros poisson, barbe pourpre, mais ce salp*rd a couler mon navire avant que je ne puisse l'aborder et lui faire sa fête. 

Keradan tendit l'oreille, la suite se promettait d'être intéressante.

Alors que Senjou me déconseilla de prendre la hache, ce que je savais dangereux, l'homme a terre se réveilla, et je reculai dans un sursaut de peur. Il ouvrit les yeux, et cela me fit trembler... Je le redressai, et croisai les bras, je détestais que l'on me rabaisse, que l'on me fasse peur...! 
Je soupirai, puis déposais mon regard sur lui: d'où venait cette corne?! Ce n'est pas humain! Mon regard se faisait interrogateur, puis, sans poser cette question, je dis:

• Vous êtes frères? C'est bien ce qui me semblait... Mais d'où vous vient cette corne...!

Oui, je sais, je ne voulais pas poser cette question, mais je n'ai pu m'en empêcher... Je dis un faible sourire gêné puis de décroisai mes bras. Cet homme était vraiment plus qu'étrange...

La remarque concernant son âge raidit Senjougahara de la tête aux pieds : comment osait-il, ce type ?  Et pour qui il se prenait ? Et ils l’avaient sortis de l’eau, quand même ! Ils auraient aussi pu le laisser crever ! … Mais le jeune blondin n’eut, finalement, pas le temps de réagir.
Et, quelque part, d’un point de vue médical, c’était mieux.

Senjou croisa les bras, une expression revêche sur le visage. Toutefois, il ne put s’empêcher d’écouter la conversation, et observer le nouveau venu dans les moindres détails. Quelle carrure ! Et Barbe Pourpre était parvenu à le couler malgré cela ? Mince, ce devait être un sacré monstre !

- Vous êtes frères? C'est bien ce qui me semblait... Mais d'où vous vient cette corne...! S’enquit alors Skya, s’étant remise de l’agression verbale précédemment endurée.

- Mais c’est pas important, ça, Skya ! S’écria l’adolescent, plus agacé par le manque d’intérêt que par l’indiscrétion d’une telle question.
C’était comme parler petites-copines alors qu’on traquait un pirate capable de faire chavirer une baraque comme celle-là ! C’était juste follement futile !
… En tout cas, pour un jeune garçon turbulent comme Senjougahara, avide d’action et d’aventure, et aimant vivre à cent à l’heure, ça l’était.

L’adolescent reprit donc, excité comme une puce :
- Il était où, Barbe Pourpre ? Il a quoi, comme bâtiment ? Ils vous ont coulés à coups de canon ? C’était quoi, comme canon ? Vous aviez quoi, comme bâtiment, vous ? Vous n’avez même pas pu l’aborder ? Il doit être vachement fort, va falloir établir un super plan d’attaque ! Z’avez déjà des idées ?
Lui-même s’efforçait de réfléchir à un moyen de piéger le forban avant qu’il ne puisse envoyer leur navire par le fond.

-Je suis né comme ça. Répondit sobrement le frère de Keradan qui ne voyait pas vraiment l'intérêt d'expliquer plus la chose.


Mais avant qu'il ne puisse répondre à Keradan le gamin s'était mit à l'assaillir de question à toutes vitesses. Ce qui était assez énervant.

*Cela, c'est une des raisons pour laquelle je déteste les mômes*.

Comme le gamin excité comme une puce ne semblait pas être prêt à se calmer, il décida donc de s'en occuper lui même.

-Gamin je te préviens si tu continus comme ça je ne me retiens pas et je t’assomme.

Quand il fut certain que le gamin n'allait plus sauter partout en parlant à la vitesse d'un ventilateur poussé à fond il se retourna vers son frère qui lui lançait un regard désapprobateur.


-Barbe pourpre voyage sur une frégate avec beaucoup de canons, moi j'avais réussis à louer un bric pour essayer le retrouver. Sauf que c'est lui qui nous a retrouvé, quand on est arrivé sur les lieux il y a eut un épais brouillard qui est tombé soudainement, au point qu'il en cachait le soleil. Alors qu'on essayait d'en sortir son navire est apparu d'un coup, comme s'il nous avait attendu. Avant qu'on puisse faire quoi que ce sois il nous a tiré dessus avec tout ses canons. j'ai juste eut le temps de sauter du navire avant qu'il n'explose.

Keradan réfléchit quelques secondes.

-Tu crois que c'est lui qui a créer ce brouillard ?

 Araktor acquiesça.

-Ouais. je pense qu'il s'en sert pour tomber sur ses cibles par surprises, ça explique qu'il réussit à détruire ou aborder des navires plus rapides que lui avant qu'ils ne puissent lui échapper.

Keradan acquiesça. Cela rendait la situation assez compliquée, il allait falloir faire attention à ce que les roles de chasseur et de proie ne s'inversent pas.

L’excitation de Senjougahara retomba d’un coup, remplacée par une fureur sourde.
Cette manie qu’avaient les adultes de le rabrouer. Comment puis-je grandir, si vous ne me laissez pas l'accès à votre monde ?
Salauds d’adultes.

- Tu crois que c'est lui qui a créer ce brouillard ?
- Ouais. je pense qu'il s'en sert pour tomber sur ses cibles par surprises, ça explique qu'il réussit à détruire ou aborder des navires plus rapides que lui avant qu'ils ne puissent lui échapper.
- Maintenant que vous avez vécu une des ses attaques, vous ne savez pas comment le contrer ou l'éviter?
Senjougahara roula des yeux, enfonça les mains dans ses poches et scruta l’horizon.

Une frégate. Un navire de guerre résistant et bien armé. Et eux étaient sur un navire marchand. Pour l’instant, ils avaient le vent dans les voiles, mais si jamais ils devaient fuir…
« Beaucoup de canons », ça faisait un chargement supplémentaire, remarque ; en cas de fuite, c’était un avantage sur eux. Mais quel était le poids de cet avantage face à tous leurs handicaps ? De surcroît, l’armement s’avérerait catastrophique dès qu’ils seraient à portée de tir.
Et avec le brouillard…
Leur ennemi premier serait, sans aucun doute, la nappe de brume dont s’enveloppait le navire du forban. Comment vaincre un ennemi invisible ?
… Et pouvait-il voir, au fait, au travers de son propre brouillard ? Keradan semblait, à la base, déterminé à s’attaquer au pirate seul. En vérité, ils n’avaient pas besoin du bâtiment et de l’équipage au complet : peut-être pourraient-ils quitter le navire dans une barque dès que le brouillard commencerait à apparaître ! Barbe-Pourpre serait-il en mesure de voir une chaloupe glisser silencieusement vers son navire, au cœur de la brume ? Cela leur conférerait l’avantage de la surprise, et pendant ce temps, le navire marchand pourrait prendre la fuite !
… Mais comment repérer la frégate ? Ils ne pouvaient risquer de l’approcher à l’ouïe dans une chaloupe…

- J'ai un plan... Commença Senjougahara d'une petite voix, mais il s'interrompit lorsqu’il sentit un brusque changement dans l’atmosphère. Autour d’eux, les marins s’agitaient. Le nom de Barbe-Pourpre avait atteint leurs oreilles, et glacé leur âme. Si l’on ajoutait à cela l’affreux monstre qui venait de monter à bord, l’on comprenait aisément que la tension puisse monter, et que les doutes se forment.

Combien de temps encore la réputation de Keradan pourrait-elle contenir les matelots superstitieux ?